SON PAYS EST UNE PRISON un film de François Rosolato (2004)   

Comment font les Birmans pour vivre sous une dictature qui, depuis deux générations a séquestré toute forme d'espoir ?

Le long du fleuve Iraouaddy apparaissent les traces de la résistance d'un peuple privé de son guide, Aung San Suu Kyi, -Prix Nobel de la Paix-, sauvagement attaquée et mise au secret.

Les voix intérieures de l'exil racontent les souffrances d'un pays meurtri.

 

 

 

 

How do the Burmese continue to live under a dictatorship which for the p ast two generations has impounded any form of hope?

Along the River Irrawaddy appear signs of resistance of a people deprived of its guide, Aung San Suu Kyi -winner of the Nobel Peace prize- viciously attacked and sequestered.

The inner voices of exile tell of the sufferings of a wounded nation.

 

Depuis la non-reconnaissance du vote démocratique du peuple birman en mai 1990, le pays est dans une impasse totale. Pourquoi voter à nouveau, si le résultat du vote peut à nouveau être nié par la junte militaire, si cela sert de nouveau à arrêter les responsables de l’opposition, ou si les nouvelles élections sont truquées ?

La peur, justifiée, s’est glissée dans tous les esprits. La plupart des dirigeants de l’opposition sont en exil ou en prison. Une femme héroïque, Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la Paix, a prouvé qu’elle pouvait être plus forte que cette peur qui immobilise le pays depuis 1990. Son exemple nourrit d’espoir un peuple plongé dans le mutisme par un pouvoir haï de tous, corrompu, lâche, inique et illégitime. En allant en Birmanie près de quinze ans après les massacres de 1988, je viens pour y trouver des traces de résistance. En scrutant le regard des gens dans ces rues, qui, en 1988, contenaient l’insurrection d’un peuple déterminé à se libérer du joug des militaires, vais-je trouver une lueur d’espoir ?

Aung San Suu Kyi a écrit :

« Nous pouvons être
Froids comme l’émeraude,
Comme l’eau au creux des mains,
Mais nous pourrions être
Comme des éclats de verre
Au creux des mains. »

L’espoir réside dans cet éclat de verre que chacun de nous peut représenter, capable de meurtrir à son niveau cette main de l’oppression, et faire lâcher prise l’étau du pouvoir.

Derrière l’Histoire des luttes pour la démocratie birmane, se pose une question plus universelle : quelles sont nos armes face à un pouvoir totalitaire ?

C’est en ce sens que l’enseignement de Suu Kyi m’intéresse : j’ai ressenti, par le courage de certaines personnes rencontrées, les forces inimaginables qu’une résistance de cette nature était susceptible de libérer.

Le corps de Suu Kyi appartient aux militaires, qu’ils peuvent séquestrer, priver de nourriture, d’habits ou de médicaments. L’enseignement de la Prix Nobel de la Paix et fille du héros de l’indépendance leur échappe, porté dans les mémoires de tout un peuple.

Une rencontre, celle d’une femme âgée, - quelques années de plus que Aung San Suu Kyi - , m’a marqué. Cette anonyme a eu le courage de me parler de la situation politique de son pays. Il faut imaginer le quadrillage par les différentes polices secrètes du pays, les rapports en neuf exemplaires dans chacune des villes traversées, pour réaliser à quel point cet acte n’est pas anodin. Elle m’a parlé de ses petits-enfants, qui croient pour l’instant aux mensonges du régime. Ils sont nés bien après les mouvements de 1988. Le moment viendra de leur révéler la vérité ; pour l’instant ils sont encore jeunes pour garder le secret en classe.

Ce film leur est dédié, afin que la mémoire de luttes héroïques du peuple birman ne s’efface pas, malgré l’exil forcé de la majeure partie des dirigeants du parti d’Aung San Suu Kyi.

François Rosolato

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